Fringante et Furie étaient bien malades. Quelle tuile, une semaine seulement avant le 24 décembre !
Quand le Père Noël était entré dans son écurie ce matin-là, il avait vu deux de ses rennes allongés dans un coin, soufflant dans leurs mouchoirs à carreaux, crachouillant en chœur, et pleurant de leurs grands yeux innocents rougis par le rhume.
Aussitôt, il avait demandé à la Mère Noël de préparer une pleine tisanière de thym et de sureau, mais malheureusement ce remède de bonne-femme n’avait pas été assez efficace, Fringante et Furie étaient toujours aussi amorphes et fiévreuses.
Alors le Père Noël décida de « prendre le renne par les cornes » et envoya cette petite annonce à l’HIHC (Hebdomadaire International des Herbivores au Chômage) :
Le Père Noël cherche deux galopeurs costauds, travailleurs et ne craignant pas le froid pour m’aider dans ma tournée qui partira du Pole Nord le 24 décembre dans l’après midi, pour revenir le 25 décembre en fin de matinée. Caresses, foin de haute qualité, eau fraiche et gourmandises assurées en plus du salaire s’élevant à 3 pièces d’or en chocolat. Si vous êtes partants, Répondez-moi au plus vite par mail à cette adresse :Perenoel@hohoho.com
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Du fond de sa triste étable l’âne Anatole qui n’avait comme seule distraction hivernale que la lecture du journal en compagnie de la vache Vanina s’exclama :
- Lis-moi ça Vanina, on pourrait le faire, non ? Qu’est-ce que tu « hi han » dis ?
- « Meuh » on est bien trop lents, voyons !
- On a huit jours pour s’améliorer et je suis certain qu’Apollon, l’étalon du Comte de la Pédanterie, sera d’accord pour nous coacher !
- Et s’il préfère y aller à notre place et nous chiper le job ?
- Il est trop frileux pour le Pole Nord, et surtout bien trop individualiste pour faire partie d’un attelage !
- Mais tu crois qu’on va s’entendre, nous, avec les rennes du Père Noël ?
- Bien sur, ces bestioles sont très sociables d’après ce que j’ai lu sur Bourricopédia, et pas fières du tout ; « hi han » plus ce ne sont que des filles, ça va te faire des copines !
- Et toi des fiancées…
Nous nous appelons Anatole et Vanina et nous venons de la ferme Labourrique en France. Âne et vache de nos états respectifs, nous sommes en passe d’obtenir notre diplôme de galopeurs chevronnés. Nous serions très honorés de vous rejoindre au Pole Nord dès le 23 décembre pour faire connaissance avec vous, votre charmante épouse et la célèbre équipe des « rennettes ».
Quand le Père Noël reçut ce mail, il sauta de joie et bisa la Mère Noël sur les deux joues :
- Un âne et une vache, voilà qui va donner un petit air de crèche à mon traineau ! Se réjouit-il
Puis, il alla annoncer la nouvelle à son troupeau de « rennettes » qui, connaissant la réputation de séducteurs des ânes, se mirent à glousser copieusement.
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Dans le gros avion rouge et vert qui les conduisait au Pole Nord, Anatole et Vanina trinquèrent avec une armée de lutins tous également recrutés par le Père Noël ; certains étaient déjà venus les années précédentes et décrivirent les jouets miraculeux qu’ils avaient pu fabriquer : des poupées mannequin à la coiffure aérodynamique qui leur permettait de voleter à travers la maison, des nounours consolateurs changeant de couleur selon l’humeur des enfants, de fabuleuses dinettes qui se remplissaient de confiture, de miel ou de crème en appuyant sur un petit bouton situé sur les couvercles …
Le voyage se passa donc au mieux, mais une fois arrivés à destination, face à leur employeur barbu et imposant, Anatole et Vanina se sentirent tout intimidés, ils étaient redevenus l’ânon et le petit veau émerveillés par leur première neige.
Dans l’écurie, c’était branlebas de combat, les « rennettes » lustraient leurs cornes avec du savon noir et du vinaigre blanc et se bouchonnaient les unes les autres pour avoir les robes les plus étincelantes.
Quand Anatole et Vanina firent leur entrée, ce fut un « Hooooo !!! » général. Les « rennettes » n’avaient encore jamais vu d’âne en chair et en os, mais toutes avaient lu Les aventures de Cadichon et suivi le dessin animé Trotro Rigolo à la télévision. Elles ne s’intéressèrent à Vanina que pour l’interroger sur sa cohabitation avec Anatole à la ferme Labourrique, et sur les goûts et les petites habitudes de l’âne.
Enfin le grand jour du départ arriva. Anatole et Vanina avaient le trac, ils se demandaient si les cours de galop avec Apollon l’étalon porteraient leurs fruits.
Positionnés en milieu d’attelage, l’âne et la vache se sentaient toutefois rassurés et réchauffés par l’haleine brulante des rennes.
A 17 heures précises, la Mère Noël souffla sur une fleur de pissenlit séchée au nez et à la barbe de son cher mari bien emmitouflé sur son traineau. Des centaines de petites volutes blanches pareilles à des cristaux de neige ailés s’éparpillèrent au dessus de l’attelage qui prit son envol dans le ciel bleu azur du Pole Nord.
Anatole et Vanina se mirent à gambader dans le firmament avec autant d’aisance que les rennes ; tout était si facile, si enchanteur et si exaltant ! L’air vif rentrait par leurs naseaux pour en ressortir sous forme de brume ouatée.
La tournée se passa merveilleusement. A chaque fois que le Père Noël disparaissait dans les cheminées avec les cadeaux à livrer, les rennes trinquaient au vin chaud avec l’âne et la vache, ce qui donnait à leur cavalcade céleste une allure chaloupée des plus oniriques.
Jamais Anatole et Vanina n’oublièrent cette fabuleuse nuit au sein de l’équipe des rennes du Père Noël, c’est pourquoi, quand arrive le mois de décembre dans l’étable de la ferme Labourrique, ils prient avec ferveur pour qu’au moins deux des rennes du Père Noël soient à nouveau enrhumés !
Pour son 151ème Café Thé, Ecureuil Bleu nous proposait de parler d’un moyen de locomotion qui nous avait marqué.
Hier, alors que je garais ma Fiat Punto dans l’un des superbes *U de Royan, mon cœur fit un bond en voyant un « caca », sagement rangé, deux places plus loin que moi.
Des lustres que je n’avais plus vu l’un de ces excréments devenus aussi rares aujourd’hui que des pierres précieuses !
Je vous entends déjà protester en me lisant : Une crotte, un étron, une bouse, une infâme déjection, c’est ça qui fait bondir ton cœur ? Mais non, je ne suis pas si folle, rassurez-vous.
« Le caca » c’est le nom que je donnais à l’Ami 6 de mon père, cette disgracieuse petite Citroën qu’il utilisait pour aller à la chasse, et où s’entassaient les bagages, deux setters anglais, un fusil, trois gibecières, deux paires de bottes en caoutchouc, un piquenique et moi, accessoirement.
Coincée sur la banquette arrière entre un sac de week-end et un panier de victuailles, je reniflais à plein nez l’odeur du skaï, du chien mouillé, du grillon charentais et des Gauloises sans filtres. Un mélange si particulier que si je le respirais à nouveau, je serais à coup sûr propulsée dans les entrailles de la Citroën de mes dix ans : cette Ami malodorante au physique ingrat, avec ses sourcils froncés, son regard de grenouille et sa crête de coq à l’arrière.
Au rythme de la Petite fleur de Sidney Bechet, la bagnole brinquebalante bondissait sur les routes de campagne, toutes vitres ouvertes, laissant échapper éclats de saxophone et volutes bleues…
Et la revoilà aujourd’hui, sa cousine, perdue dans ces années de crise, elle qui n’avait connu que les « Trente glorieuses »
Ma Fiat Punto me semblait bien fade tout à coup face à l’audace de sa silhouette : quel caractère avec ces sourcils froncés ! Innovant ce regard de grenouille et un vrai trait de génie cette crête de coq à l’arrière, digne de l’inventivité d’un St Laurent ou d’un Christian Dior !
Je descendis de mon insignifiante voiture et m’approchai timidement du merveilleux « caca ». Si l’une des vitres était entrouverte, peut-être pourrais-je retrouver l’odeur… au moins celle de la banquette de skaï, à défaut du mélange subtil d’antan.
Elle était là, à portée de main, j’allais pouvoir effleurer sa tôle d’un blanc douteux et vérifier ses ouvertures, quand tout à coup… Elle disparut comme elle était apparue, dans le tunnel du passé.
*Une particularité intéressante de l’architecture du Front de Mer de Royan est la présence de petits bâtiments perpendiculaires à l’axe principal et qui forment les « U » ouverts sur la mer et dans lesquels on trouve des boutiques et des places de parking.
Le petit texte ci-dessous m’a été inspiré par cette photo de Karl Magnuson dans le cadre de l’atelier BRICABOOK numéro 400.
Depuis la maternelle, c’était ça : Fanny, Ludo et Cléa, les trois inséparables de la rue des Glycines. Hilares sur le tourniquet du square, bavards au fond de leurs classes de primaires, buissonniers au collège et assidus au lycée. Le jour des résultats du bac, Ils avaient scellé un pacte :
Fanny : – Si jamais on se perdait de vue…
Ludo : – Mais t’es dingue, ça peut pas arriver un truc pareil !
Cléa :- Non pas à nous !
Fanny : – Non mais si ça arrivait quand même, promettez-moi… on se retrouve le 30 juin de chaque année à l’heure du soleil couchant tout en haut de la colline des Herbus !
Ludo : – Ok !
Cléa : – D’accord, mais t’es parano, jamais on s’abandonnera !
Et puis, pour leurs vingt ans, en septembre 2001, il y avait eu leur voyage à New York, celui dont ils rêvaient depuis touts jeunes, les spectacles de Brodway pour Fanny, le charme de Brooklyn pour Ludo, les allées de Central Park pour Cléa et les Tours Jumelles pour tous et à jamais …
***
Fanny : – C’est vous les amis, c’est bien vous ?
Ludo : – Oui, on est le 30 juin !
Cléa : – Et on est là, tous les trois en haut de la colline des Herbus !
Fanny : -Alors, c’est qui qui avait raison ??
Ludo et Cléa : Toi !!
Sur ces mots, trois paires d’ailes s’enlacèrent pour s’envoler au-dessus de la colline verte, du coucher de soleil orange et du ciel bleu.
Le petit texte ci-dessous m’a été inspiré par cette photo de Elle Kennedy dans le cadre de l’atelier BRICABOOK numéro 396.
Et si c’était ça la vraie vie ? Se poser, admirer à perte de vue sans penser à soi, sans panser les blessures des autres. Oublier les gens, les villes, les détails. Juste regarder au loin, se laisser renverser, se laisser transpercer par la beauté du Ciel et de la Mer. Ne pas bouger, ne pas repartir. Se nourrir des provisions emportées, dormir là, même s’il fait un peu froid. Se réveiller là, dans la Beauté. Résister à la faim, manger l’herbe autour de soi pour ne pas céder sa place, sa place aux premières loges du plus intense spectacle qui soit, celui du Ciel, de la Mer et de la Terre, le Spectacle Essentiel.
Consigne : Ecrire un texte à la suite de ce bel incipit de Chrsitian Bobin tiré de: Un assassin blanc comme neige. « J ‘ai accroché mon cerveau au portemanteau puis je suis sorti et j’ai fait la promenade parfaite. »
J’ai accroché mon cerveau au portemanteau puis je suis sortie et j’ai fait la promenade parfaite. A la place de cet amas de neurones, de fibres et de connections électriques, j’avais un papillon bleu qui voletait dans la tête. Disparus les raisonnements, les prévisions, les réflexions. Juste des sensations brutes. Les orteils sur le sable mouillé, le soleil dans les yeux, le cri des mouettes dans les oreilles, le parfum de l’océan dans les narines.
Et puis, je suis rentrée, mes jambes ont su me reconduire chez moi toutes seules.
Mon cerveau était toujours pendu là, près du chapeau de paille, de la casquette jaune et du caban :
– Alors tu me remets, oui ou non ?! semblait-il me dire
– Mais pour quoi faire ?
– Parce que sans moi, tu es une écervelée !
Il était si arrogant, avec ses quatre lobes et son teint rosâtre. Comment avais-je pu me laisser dicter ma vie pendant tant d’années par ce laideron gélatineux ?
Alors je lui ai lancé :
– Et bien, si c’est mon choix à moi d’être une écervelée ?!
Il n’a pas su quoi répondre, il a juste opiné du lobe frontal… Moi, j’ai pris le chapeau de paille, je l’ai posé sur ma tête avec le papillon dedans, et puis je suis ressortie pour ne jamais revenir, et j’ai fait ma vie parfaite.
Le texte ci-dessous m’a été inspiré par cette photo d’Immo Wegmanndans le cadre de l’atelier BRICABOOK numéro 391.
Ma Fiat 500 et moi on ne faisait qu’un. Elle était le prolongement de mon corps, mes ailes quoi…
Certains de mes copains, plus riches ricanaient : « Toi et ton insecte rouge ! » qu’ils disaient. Un insecte peut-être, mais un insecte volant ! Avec elle je tutoyais les nuages et le ciel bleu ! Ils pouvaient bien se moquer ces prétentieux, vautrés dans la pesante DS de leur père. Quand je montais dans leur voiture en forme de baleine, j’avais tout de suite le mal de mer ! Tandis que dans ma Fiat, quelle légèreté, quel décollage pour un voyage plein de rêves, d’amusement et de rires !
On s’y serrait à six avec mes amies de toujours. Je prenais toujours Suzy comme copilote, parce qu’elle était nulle avec les cartes routières, et c’est ça qui était bien ! On se retrouvait sur des petites routes cabossées, ou dans des champs de chardons… A l’arrière il y avait les jumelles et puis Cécile avec sa petite sœur Ninette sur les genoux. On chantait « Le lundi au soleil » à tue-tête en passant devant le lycée où les bons élèves faisaient la queue pour rentrer au bagne, et nous les vilaines redoublantes, les adeptes du radiateur, du bavardage et des cocotes en papier, on filait dans notre petit bourdon rouge à la poursuite du nectar de la vie.
Depuis cette époque joyeuse, bien des choses ont changé… J’ai déménagé, j’exerce un bon métier malgré mon passé de cancre, je vis dans un appartement cossu, je conduis un gros 4×4 et j’ai de nouveaux amis, un peu ennuyeux…
Mais depuis quelques temps, je vois bourdonner des nuées de petits insectes dans les rues et je sens que moi aussi, je vais craquer, retrouver mes anciennes copines et à nouveau, m’envoler !
Elle est simple et modeste la petite gare de la station balnéaire. D’ailleurs, aucun train rapide ne daigne y venir. Seules les Michelines y arrivent et en repartent avec lenteur. De véritables tortues ferroviaires Mesdemoiselles les Michelines. Pardon, maintenant il faut les appeler « TER ». Pourtant, « Micheline » est un nom charmant alors que « TER » ne l’est pas ! Et il faut dire « Mesdames », bien que « Mesdemoiselles » soit plus approprié pour désigner ces jolies voyageuses ! Leur douce innocence se révèle dans leurs phares candides et le rougeoiement de leur tôle quand elles entrent en gare.
La petite boutique à journaux ne parle que de soleil, de pêches miraculeuses et de bonnes nouvelles. Le bureau des bus locaux propose des excursions merveilleuses : La Palmyre, le Pont du Diable, Ronce les bains.
Au café de la gare, ça sent déjà l’océan, une odeur d’iode, de sel, de vent et de soleil qui donne faim ! La serveuse aux yeux bleus délavés des gens de là-bas sert des crevettes grises, des céteaux grillés et des bulots mayonnaise arrosés de vin blanc.
Il n’y a que deux taxis sur le parking, ils sont amarrés comme des caboteurs au port. Leurs chauffeurs ont tout le temps de papoter et de blaguer car les voyageurs préfèrent prendre le large à pied en traînant leurs valises à roulettes comme des nasses à crustacés. Une fois qu’ils ont quitté l’esplanade de la gare, on n’entend plus que le bruissement des queues de lièvres et des oyats sous le vent marin.
Cette gare est une gare Terminus, on ne peut pas aller plus loin, on y arrive joyeux et on en repart triste, c’est tout. Elle ressemble aux grandes vacances.
Jean-Paul descend de la correspondance en provenance de Poitiers. Ses cinquante ans ne lui ont pas fait de cadeau, son visage a du mal à remonter la pente depuis son anniversaire. Il n’a qu’un petit sac de voyage. Il ne restera pas plus de deux jours. Juste le temps de réconforter Jeannine et Jacques, ses vieux parents, de les emmener une fois au restaurant et de les accompagner au Grand Marché, dimanche matin.
Son pas est lent, il n’est pas pressé de quitter la petite gare où se pressent les vacanciers enjoués. Pour eux c’est le prélude de semaines inoubliables, faites de plage, de baignades, de bronzage, de volley-ball, de rires, de flirts et de boites de nuit. Jean-Paul prend le temps de les observer pour tenter de happer leur joie, lui qui est si morne.
A Paris, son couple désarticulé, ici ses parents à la dérive, et lui qui navigue entre ces deux naufrages…Ses épaules se voûtent sous le poids de son sac à dos plein de morosité ; son visage n’exprime rien, il sait déjà tout de ces week-ends routiniers et pesants qu’aucun imprévu ne vient jamais agrémenter.
Ghislaine replace une mèche châtain derrière son oreille droite et astique ses lunettes rondes à l’aide d’une petite lingette avant de reprendre sa marche vers le hall de la gare ; aujourd’hui elle aura beaucoup de choses à voir et elle ne veut pas en perdre une miette. Ghislaine a tout prévu pour ce voyage parisien, qui sera peut-être sans retour, l’énorme valise à roulettes à la limite de l’explosion, le sac à main bien organisé et compartimenté et le sac en nylon avec le casse-croûte, le rouleau d’essuie-tout et la petite bouteille d’eau. Même son cœur est fin prêt à partir ; à quarante ans, il était temps ! Temps qu’elle abandonne son service au Salon de Thé de la Corniche, rue des Bigorneaux, temps qu’elle renonce à trouver l’homme de sa vie parmi ses clients (qui n’étaient d’ailleurs que des clientes) temps qu’elle prenne la décision de quitter ce mini monde rassurant et plan-plan pour plonger vers la capitale.
Jean-Paul se penche. Une chance qu’il ait eu besoin de relacer son soulier droit, une enveloppe blanche déjà maculée de traces de pas indifférents gît sur le sol carrelé de la gare. Il hésite à la ramasser, cela le dégoûte, Jean-Paul est un peu maniaque. Mais une petite voix lui murmure que c’est peut-être là l’imprévu qu’il attendait. On ne sait jamais…
Si cette enveloppe contenait de l’argent, il pourrait inviter ses parents au Cardinal des Mers avec vue sur l’estuaire plutôt qu’à leur petit restaurant de quartier avec vue sur rien. Et si l’enveloppe renfermait une clef ? Il pourrait la rapporter aux Objets Trouvés et ainsi, rendre service à un inconnu. Et s’il s’agissait d’une place pour une pièce de théâtre ou une exposition ? Il en profiterait ! Cela le distrairait de ses contraintes et de ses ennuis… Jean-Paul se décide enfin à prendre l’enveloppe. Elle est légère et peu épaisse. Il se demande pourquoi ses mains tremblent en l’ouvrant.
A l’intérieur, une feuille de papier à lettres démodé pliée en quatre.
Chère Ghislaine,
C’est avec grand plaisir que je te prête la petite chambre de bonne au dessus de mon appartement situé 5 rue Delambre Paris 14 ème, le temps que tu trouves un job. Je serai vraiment ravie de te revoir après toutes ces années.
Je t’embrasse, ton amie d’enfance, Marianne.
PS : Au fait, ton numéro est bien le 06 04 98 56 20 ?
Jean-Paul sort son téléphone portable de sa poche et compose le numéro. Au bout du fil, une charmante voix… au bout du quai un train qui s’en va…