Un papillon au plafond

Consigne : Ecrire un texte à la suite de ce bel incipit de Chrsitian Bobin tiré de: Un assassin blanc comme neige. « J ‘ai accroché mon cerveau au portemanteau puis je suis sorti et j’ai fait la promenade parfaite. »

J’ai accroché mon cerveau au portemanteau puis je suis sortie et j’ai fait la promenade parfaite. A la place de cet amas de neurones, de fibres et de connections électriques, j’avais un papillon bleu qui voletait dans la tête. Disparus les raisonnements, les prévisions, les réflexions. Juste des sensations brutes. Les orteils sur le sable mouillé, le soleil dans les yeux, le cri des mouettes dans les oreilles, le parfum de l’océan dans les narines.

Et puis, je suis rentrée, mes jambes ont su me reconduire chez moi toutes seules.

Mon cerveau était toujours pendu là, près du chapeau de paille, de la casquette jaune et du caban :

– Alors tu me remets, oui ou non ?! semblait-il me dire

– Mais pour quoi faire ?

– Parce que sans moi, tu es une écervelée !

Il était si arrogant, avec ses quatre lobes et son teint rosâtre. Comment avais-je pu me laisser dicter ma vie pendant tant d’années par ce laideron gélatineux ?

Alors je lui ai lancé :

– Et bien, si c’est mon choix à moi d’être une écervelée ?!

Il n’a pas su quoi répondre, il a juste opiné du lobe frontal… Moi, j’ai pris le chapeau de paille, je l’ai posé sur ma tête avec le papillon dedans, et puis je suis ressortie pour ne jamais revenir, et j’ai fait ma vie parfaite.

19 commentaires sur “Un papillon au plafond

  1. Bon jour,
    Si cela pouvait être … vrai …
    Pour ma part, j’avais simplement l’idée de pourvoir le passer sous l’eau, le laver, enlever toutes les ratures, les bleus, les bosses, les blessures, les angoisses …
    Max-Louis

    Aimé par 1 personne

  2. Merci pour ce superbe texte qui fait tellement de bien. Les assertions poétiques de Christian Bobin posent un regard ingénu et décalé sur la vie tel qu’on est surpris de ne pas déjà l’avoir eu soi-même… ou qu’on est persuadé de l’avoir déjà eu sans s’en apercevoir… Bien sûr que je me suis précipitée à ma médiathèque pour emprunter « Un assassin blanc comme neige » de Christian Bobin chez Gallimard (11,50 euros). J’ai trouvé page 28 l’excipit cité qui termine le 9ème « chapitre » (ils ne sont pas numérotés !)… et une mine d’autres pistes pour rêver ! Bonne journée !

    Aimé par 2 personnes

  3. Merci pour ce beau texte, d’une sagesse biblique : aux simples d’esprit, je crois me souvenir que même la vie éternelle leur sera parfaite. Tout cela se tient : plus je lis Christian Bobin, plus il m’apparaît comme un archange.

    Aimé par 1 personne

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