L’art de perdre ou l’art de Pierre

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Pierre avait perdu la boule.
Depuis qu’il était tombé de l’arbre, il avait vu des milliers d’étoiles et puis, plus rien n’avait été comme avant. Même sa boussole n’indiquait plus le nord, comme si elle avait voulu l’accompagner dans sa folie. Il n’avait jamais retrouvé sa maison ni Mirette, sa fiancée. Au bout d’une longue marche en zigzag depuis l’arbre, jusqu’à la mer, il était resté planté sur la plage ; il avait cru que l’océan était un mirage, mais après avoir mis ses pieds dedans il s’était rendu à l’évidence : c’était bien de l’eau.
A cause de sa perte de boule, il avait essayé de boire cette mer salée, berk ! il avait bien vite recraché puis s’était endormi sur le sable le plus fin du monde.

Mirette cherchait Pierre depuis trois jours, elle ne comprenait pas pourquoi il n’était pas rentré à la maison. Pierre, son gentil Pierre … Elle lui avait toujours fait confiance; impossible qu’il soit allé en chercher une autre, il lui était forcement arrivé quelque chose.
Pour essayer de le retrouver, elle était d’abord passée à l’usine de pétales où son fiancé fabriquait des fleurs en soie pour la fête de la mer. On en faisait des guirlandes roses pour orner les bateaux. Elle était tombée sur Gérard, le patron de Pierre, un homme bourru qui ne perdait jamais rien, à part son calme :
– Fichtre non que je l’ai pas vu, ton Pierre ! Même que j’ai plus de trois cents guirlandes à me coltiner tout seul, moi !
Alors Mirette avait pris son courage à deux mains et ses jambes à son cou pour filer loin de Gérard et continuer ses recherches.
Elle était arrivée sur la plage, la plage au sable le plus fin du monde, celle où Pierre l’emmenait perdre la notion du temps et nager à en perdre haleine, le dimanche…
Cela avait été comme une apparition : Pierre, recroquevillé au milieu des petits oiseaux de bord de mer et des coquilles d’huîtres, Pierre endormi, sa boussole déglinguée à la main.

– Pierre ! Pierre, tu vas bien ? C’est moi, Mirette ! Pierre, tu m’entends ?
Alors Pierre s’était redressé, il avait regardé Mirette comme jamais avec son cerveau plein d’étoiles et ses yeux tout neufs :
– Vous connaissez mon nom ?! Moi je ne vous ai jamais vue, mais je vous aime déjà …

MH

Petite questionnette : Et vous, avez-vous un jour trouvé un côté positif à la perte de quelque chose ?

15 commentaires sur “L’art de perdre ou l’art de Pierre

  1. Bien sur que cela m’est arrivé, même très souvent, on s’angoisse pour quelque chose que l’on aura plus sans savoir que ce qu’on aura en remplacement, ce sera beaucoup mieux. On se dit : dire qu’il a fallu que je perde ça pour avoir ce que j’ai aujourd’hui… ce que je ne sais pas de manière sûre c’est si c’est toujours positif ?

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  2. Rétrospectivement j’ai quasi toujours trouvé du positif aux choses ou évènements ou personnes qui s’étaient présentés d’abord comme une perte. Avec l’expérience je pense aujourd’hui qu’une perte n’est pas une perte mais un changement.
    La seule chose que j’ai peur de perdre c’est la tête 😉… mais après tout, si je ne m’en rends pas compte…

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  3. Bonjour,
    Il y a 5 ans je perdais une bague à laquelle je tenais énormément (elle est en argent et représente un entrelacs de coeurs)…
    J’ai cherché cette bague pendant 5 ans, de manière quasi-obsessionnelle…
    Au fond de moi, quelque chose me disait que cela n’était pas possible, elle ne pouvait pas être sortie de ma vie aussi fugitivement.
    Il y a quelques mois, dans mon jardin, en taillant une haie de lierre devenue envahissante, je trouve ma bague emmitouflée dans un épais feuillage, endormie au pied d’une barrière en bois!
    Le choc, j’ai éprouvé une telle joie, immense, fabuleuse.
    Le côté positif est d’avoir conservé intacte la confiance et une intime conviction, l’espoir se cache toujours un peu dans les jupes de l’art de perdre.
    Cette bague m’a sauté au doigt, ma plus grande joie fut d’avoir cru en son retour dans ma vie…Elle n’était pas loin, juste un peu perdue, en sommeil…
    La bonne journée

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  4. Je perds souvent mes lunettes et effectivement…c’est parfois mieux comme ça. Elles sont chouettes tes nouvelles ! Parfois drôles, parfois tristes et dures mais directes…comme la vie.

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  5. Bon jour,
    Aux premiers mots, j’ai pensé : Pierre Boulle l’auteur de « La planète des singes » 🙂
    En fait, le drame est conséquent pour les deux protagonistes. L’un perd son identité et le reste tandis que l’autre a perdu l’essence même du pourquoi elle l’avait aimé … En tout état de cause, il faudra tout reconstruire … différemment … peut-être avec le même Amour ?
    Max-Louis

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